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L’expropriation de la santé selon Ivan Illich

L’expropriation de la santé afflige l’homme moderne. Ivan Illich avance dans Némesis médicale que la médecine moderne a entraîné une régression structurelle du niveau de santé en faisant perdre aux individus le sentiment que leur bien-être dépend de leur harmonie biologique avec leur environnement. Il est lui-même décédé d’un cancer qu’il a préféré supporter jusqu’au bout (plutôt qu’avoir à en supporter le traitement).

La convivialité selon Ivan Illich

La médecine moderne change le rapport à la santé. Ivan Illich affirme tout d’abord qu’elle veut systématiquement étouffer la douleur. Le développement de l’anesthésie symbolise le fait que la société prétend, à travers la pratique médicale, délivrer l’individu de la douleur. Son ambition fondamentale est de minimiser la souffrance afin de maximiser le bonheur. Seulement, cet effort ignore la logique de la jouissance : la suppression de la douleur rend l’homme incapable de jouir des plaisirs simples et des stimulations faibles. En deuxième lieu, la médecine moderne modifie la vision de la maladie. Enracinée dans la conception du corps de Descartes, la vision moderne de la maladie définit la santé comme l’absence de symptômes cliniques, ce qui légitime une intervention médicale sans bornes. Telle est, pour Ivan Illich, l’idéologie qui rend la population dépendante de la médecine moderne. Elle conduit notamment à considérer la vieillesse comme une maladie et à légitimer l’acharnement thérapeutique sur les personnes âgées. Leur sort est révélateur d’un refus de céder devant la mort. La foi des citoyens en le pouvoir de la médecine est si grande que celle-ci a désormais une fonction religieuse : « Que les médecins contemporains le veuillent ou non, avance Ivan Illich, ils se conduisent en prêtres, en magiciens et en agents du pouvoir politique » (Némesis médicale). Les effets non techniques du service médical dépasseraient en réalité ses effets techniques.

L’utilitarisme de Bentham

Ivan Illich dénonce la contre-productivité de la médecine moderne

La médecine moderne est contre-productive. Ivan Illich met en doute l’efficacité de la plupart des interventions médicales. À ses yeux, les médecins ont davantage diffusé le mythe de l’efficacité des rituels médicaux qu’ils n’ont véritablement réduit la morbidité. Voici les principales raisons de l’amélioration du bien-être de la population : l’hygiène publique a assaini l’environnement ; les gens vivent et travaillent dans de meilleures conditions ; ils ont un meilleur régime alimentaire. En comparaison, le bénéfice des soins médicaux récents est douteux. Ils ne font bien souvent que transformer la maladie et prolonger, voire intensifier la souffrance. Ivan Illich accuse les médecins de dissimuler les effets iatrogènes de leurs interventions, c’est-à-dire la dégradation de la santé provoquée par les actes censés l’améliorer. Dans les faits, la thérapeutique moderne engendrerait une foule d’effets secondaires négligés : « la douleur, les dysfonctions, l’invalidité et l’angoisse résultant des interventions médicales rivalisent maintenant avec la morbidité causée par la circulation automobile, le travail et même les opérations militaires » (Némesis médicale). Ces effets s’expliquent d’abord par un excès d’intervention, ainsi qu’en atteste la surconsommation de médicaments et de procédures médicales (surtout dans les pays riches). Ensuite, la médecine moderne place les individus dans des environnements nocifs. Retirer les vieillards de leur confort personnel et familial risque par exemple d’accélérer la maladie, plutôt que de favoriser le rétablissement. Enfin, Ivan Illich dénonce la toxicité psychologique de l’intervention médicale : « l’angoisse est peut-être l’effet le plus général de tout contact avec la technique médicale ».

La société du risque selon Ulrich Beck

La médecine moderne révèle l’échec de la société moderne. Ivan Illich affirme qu’elle contribue au malaise de l’individu dans son milieu en même temps qu’elle le dissimule. Ainsi, la iatrogénèse est un aspect de la contre-productivité générale de la société industrielle. Le système médical, comme le système scolaire, accroît la disharmonie entre l’homme moderne et son milieu social. Mais le plus grand préjudice qu’il cause est de dissimuler le fait que l’industrialisation de la vie est malsaine. Selon Ivan Illich, le gonflement des dépenses médicales compense la dégradation des conditions de vie — l’insalubrité du travail, la saleté des villes, ou encore la fébrilité des transports. « Plus les gens pensent avoir besoin d’être soignés, écrit-il dans Némesis médicale, et moins ils se révoltent contre la croissance industrielle. » Le problème économique est que les fournisseurs empêchent les consommateurs d’évaluer leurs bénéfices réels. Sur le plan politique, la médicalisation de la vie perpétue la hiérarchie sociale. Intégrée aux élites du système industriel, la profession médicale protège ses privilèges en faisant de son savoir et de sa pratique un édifice ésotérique inaccessible aux profanes. La professionnalisation de la médecine illustre plus fondamentalement la manière dont la société industrielle dépossède l’homme de l’autonomie dont il a joui dans la majeure partie de l’histoire de l’humanité. Tout comme il peut de moins en moins se déplacer par lui-même ou apprendre par lui-même, il ne peut presque plus se guérir lui-même ou soigner son prochain.

Une société sans école selon Ivan Illich

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Qui est Romain Treffel ?

Passionné par les idées, je veux vous aider à mieux comprendre votre existence grâce au meilleur de la pensée. C’est dans cet esprit que je travaille à rendre les grands concepts plus accessibles et les grands auteurs plus proches de nous.

Passé par l’ESCP, la Sorbonne, et l’École Normale Supérieure, j’aide également les étudiants à réussir les épreuves littéraires des concours des grandes écoles.

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