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La théorie anarchiste de la science de Paul Feyerabend

Les hommes modernes survalorisent la science. Dans Contre la méthode, le philosophe Paul Feyerabend remet radicalement en cause la vision traditionnelle du progrès scientifique à la fin des Trente Glorieuses. Il affirme que la science est loin d’être le discours de rigueur, d’objectivité et de méthode qu’elle prétend être.

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Le progrès scientifique est réduit à l’obéissance à la méthode. Paul Feyerabend estime que cette conception a émergé à la fin du XIXe siècle pour sauver la légitimité de la science après la découverte de failles dans les paradigmes classiques (celui de Newton en physique, par exemple). Cette nouvelle vision de la science a été formalisée par la théorie de la falsification de Karl Popper. D’après ce dernier, une théorie scientifique explique le plus grand nombre possible de phénomènes le plus simplement possible, jusqu’à ce que survienne un fait qui la contredit et impose ainsi de la corriger, voire de la remplacer par une autre théorie. Cette évolution du savoir scientifique par essai et erreur implique qu’une seule théorie prédomine dans un champ de recherche donné à un moment donné. Or, pour Paul Feyerabend, l’obéissance à la méthode entrave le progrès scientifique. « L’idée que la science peut, et doit, être organisée selon des règles fixes et universelles est, affirme-t-il, à la fois utopique et pernicieuse » (Contre la méthode). La conception de Popper empêche l’émergence de théories novatrices, car étant jeunes, elles n’ont pas les qualités nécessaires pour concurrencer la théorie dominante. Elle fait également du chercheur un simple collectionneur de faits, incapable de penser hors du cadre. Paul Feyerabend estime ainsi que la définition de la science par la méthode aboutit à la sclérose et au dogmatisme.

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Paul Feyerabend s’érige contre la méthode scientifique

Le progrès de la science est anarchique. L’argument principal de Paul Feyerabend est que les méthodologies existantes ne s’accordent pas avec l’histoire de la science, tout particulièrement de la physique. Dans les faits, les savants ne réussissent bien souvent à produire du nouveau qu’en s’émancipant des règles trop étroites de la recherche. Le véritable génie scientifique est celui qui ose bousculer les certitudes et les préjugés. Il se sert de toutes les ressources à sa disposition ; il n’hésite pas à tricher, ou à aller chercher son inspiration dans les domaines les plus surprenants. Paul Feyerabend illustre sa thèse avec l’exemple de Galilée, le plus célèbre astronome de tous les temps. La théorie dominante de l’époque était celle d’Aristote, selon lequel la Terre ne tourne pas. Celle de Galilée péchait à plusieurs égards : elle calculait moins bien le mouvement des étoiles et ne permettait pas d’expliquer la chute d’un corps du haut d’une tour. Or, plutôt que de corriger sa théorie ou d’en inventer une nouvelle, Galilée l’a conservée telle quelle et y a ajouté une théorie ad hoc (ce qui est absolument contraire à la méthode scientifique). « Il faut applaudir Galilée, estime Paul Feyerabend, d’avoir préféré protéger une hypothèse intéressante, plutôt qu’une hypothèse sans éclat » (Contre la méthode). De tels exemples seraient légion dans l’histoire de la science. Paul Feyerabend affirme même que les progrès majeurs sont réalisés en violation de la méthode, souvent en recyclant une théorie abandonnée.

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La science est une forme de pensée parmi d’autres. Paul Feyerabend arrive à cette conclusion en critiquant la vision du monde sous-jacente à la méthode scientifique. Cette vision du monde repose sur la séparation entre, d’une part, les faits, et d’autre part les théories qui expliquent les faits. Or, il n’existe pas de faits bruts imperméables par rapport à la théorie. Les faits sont toujours biaisés par une théorie dans la mesure où l’idéologie de l’observateur (qui lui a été inculquée par son éducation) le conditionne à ne voir qu’une partie de la réalité. Par exemple, l’univers mental, imprégné par les mythes, de l’homme de l’Antiquité attirait son attention sur de tout autres types de faits que ceux perçus par l’homme moderne. Paul Feyerabend estime donc que le progrès de la connaissance humaine procède essentiellement par un déplacement du regard : certains faits disparaissent ; certains changent ; d’autres, enfin, deviennent visibles. La science méthodique est donc une forme de pensée focalisée sur certains faits. « La science, écrit Paul Feyerabend, est beaucoup plus proche du mythe qu’une philosophie scientifique n’est prête à l’admettre. C’est l’une des nombreuses formes de pensée qui ont été développées par l’homme, mais pas forcément la meilleure » (Contre la méthode). Les scientifiques qui la considèrent comme une forme supérieure de connaissance sont des idéologues qui n’ont pas réfléchi aux limites de leur mode de pensée. Dès lors, Paul Feyerabend plaide pour un développement libertaire du savoir, hors de tout carcan méthodologique.

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Qui est Romain Treffel ?

Passionné par les idées, je veux vous aider à mieux comprendre votre existence grâce au meilleur de la pensée. C’est dans cet esprit que je travaille à rendre les grands concepts plus accessibles et les grands auteurs plus proches de nous.

Passé par l’ESCP, la Sorbonne, et l’École Normale Supérieure, j’aide également les étudiants à réussir les épreuves littéraires des concours des grandes écoles.

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