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Le garçon de café de Sartre

Le garçon de café est un célèbre exemple philosophique. Dans L’être et le néant, Jean-Paul Sartre analyse l’attitude du serveur d’une brasserie parisienne afin de mettre en évidence la manifestation de la mauvaise foi. L’exemple du garçon de café montre que l’homme n’accepte pas le fait qu’il est radicalement libre de se définir.

La liberté selon Sartre

Le garçon de café joue un rôle. Jean-Paul Sartre le prend en exemple afin d’illustrer concrètement le fait que la franchise (ou la sincérité), définie comme l’adéquation absolue de l’être avec lui-même, n’est qu’un idéal, tandis que la mauvaise foi est bien réelle. Seulement, l’homme est guidé par cet idéal. C’est pourquoi il est soumis à l’obligation constante d’agir pour réaliser l’adéquation entre, d’une part, ce que ses actes disent qu’il est, et d’autre part ce qu’il est censé être. « Considérons ce garçon de café, demande Sartre. Il a le geste vif et appuyé, un peu trop précis, un peu trop rapide, il vient vers les consommateurs d’un pas un peu trop vif, il s’incline avec un peu trop d’empressement, sa voix, ses yeux expriment un intérêt un peu trop plein de sollicitude pour la commande du client, enfin le voilà qui revient, en essayant d’imiter dans sa démarche la rigueur inflexible d’on ne sait quel automate, tout en portant son plateau avec une sorte de témérité de funambule, en le mettant dans un équilibre perpétuellement instable et perpétuellement rompu, qu’il rétablit perpétuellement d’un mouvement léger du bras et de la main » (L’être et le néant). Cette description compare la conduite du garçon de café à un jeu. Ses mouvements, ses mimiques et sa voix ressemblent à des mécanismes. Pour Sartre, le garçon de café est en représentation.

L’existentialisme selon Sartre

Sartre révèle l’illusion du garçon de café

Le garçon de café s’emprisonne dans sa condition. Sartre affirme que le garçon de café joue à être garçon de café. Il s’agit d’une attitude de repérage et d’investigation, comme lorsque l’enfant joue avec son corps pour apprendre à le connaître. Mais cette attitude a un sens essentiel pour le garçon de café : elle lui permet de réaliser sa condition. Il en est de même pour tous les commerçants (tels l’épicier, le tailleur, le commissaire-priseur), car leurs clients attendent d’eux qu’ils jouent le rôle de leur profession. Le phénomène ne se limite pas au commerce. On le retrouve par exemple dans le soldat qui, en se tenant strictement au garde-à-vous, prétend réaliser sa fonction de soldat. « Voilà bien des précautions, conclut Sartre, pour emprisonner l’homme dans ce qu’il est. Comme si nous vivions dans la crainte perpétuelle qu’il n’y échappe, qu’il ne déborde et n’élude tout à coup sa condition. Mais c’est que, parallèlement, du dedans le garçon de café ne peut être immédiatement garçon de café, au sens où cet encrier est encrier, ou le verre est verre » (L’être et le néant). Pourtant, le garçon de café peut réfléchir à sa condition. Il connaît ses devoirs (se lever tôt le matin, balayer le sol avant l’ouverture, etc.) et ses droits (les pourboires, l’affiliation à un syndicat, etc.), mais ces propriétés de sa condition ne sont en réalité que des possibilités abstraites. Sartre montre donc il n’y a pas d’essence du garçon de café.

La question juive selon Sartre

Le garçon de café révèle l’absence d’essence. Sartre part du principe que le garçon de café est en représentation pour les autres, mais également pour lui-même, de telle sorte qu’il n’est ce qu’il prétend être que sur le mode de la représentation. Or, cela signifie qu’il ne fait qu’imaginer être garçon de café ; que sa condition n’existe pas hors de l’esprit humain. « J’ai beau, écrit Sartre, accomplir les fonctions de garçon de café, je ne puis l’être que sur le mode neutralisé, comme l’acteur est Hamlet, en faisant mécaniquement les gestes typiques de mon état et en me visant comme garçon de café imaginaire à travers ses gestes pris comme « analogon ». Ce que je tente de réaliser, c’est un être-en-soi du garçon de café, comme s’il n’était pas justement en mon pouvoir de conférer leur valeur et leur urgence à mes devoirs d’état, comme s’il n’était pas de mon libre choix de me lever chaque matin à cinq heures ou de rester au lit, quitte à me faire renvoyer » (L’être et le néant). Plus généralement, le garçon de café est garçon de café comme le diplomate est diplomate, ou le journaliste journaliste. Ils s’appellent ainsi, mais leurs conditions ne relèvent pas de l’être-en-soi, c’est-à-dire de la réalité constituée. Il n’existe aucune essence qui les définisse. À la vérité, ce qu’ils sont dépend entièrement de leur existence. Sartre en conclut que le garçon de café est fondamentalement libre d’être ce qu’il entend être.

L’être et le néant selon Sartre

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Qui est Romain Treffel ?

Passionné par les idées, je veux vous aider à mieux comprendre votre existence grâce au meilleur de la pensée. C’est dans cet esprit que je travaille à rendre les grands concepts plus accessibles et les grands auteurs plus proches de nous.

Passé par l’ESCP, la Sorbonne, et l’École Normale Supérieure, j’aide également les étudiants à réussir les épreuves littéraires des concours des grandes écoles.

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